Depuis 2011, le Shoes Bar présente en permanence 3 installations de Mary Sue dans ses deux boutiques de Nantes (France). Spécialement conçues pour le magasin-concept, ces vidéos jouent ironiquement avec les codes et les supports publicitaires. 

Si l'image vidéo en magasin est généralement utilisée à des fins publicitaires, ici, Mary Sue transforme 2 écrans en fausses cabines d'essayage avec des performances décalées (La cabine d'essayage, Les lois de l'attraction) qui prennent le contre-pied des codes commerciaux et des clichés féminins. Au-dessus des caisses, "Social Instinct" une installation vidéo composée de 5 écrans synchronisés reprend la mythique scène de l'interrogatoire de Sharon Stone dans "Basic Instinct" (Paul Verhoeven, 1992) dans une boucle continue et une chorégraphie de jambes qui se croisent et se décroisent en rythme.
A cette époque (il y a 30 ans), c'est la supposée absence de petite culotte qui avait fait scandale. Si l'installation s'amuse avec un érotisme facile à rejouer la scène - mais cette fois-ci - sans équivoque (Ouais, ces jambes-là portent bien des culottes ... Fin du mythe messieurs!), C'est l'utilisation du corps féminin à des fins mercantiles qui est dénoncée, par la duplication, la synchronicité, la mécanique et l'apparente légèreté des images.

La cabine d'essayage
L'image vidéo dans un magasin est généralement consacrée au message publicitaire. Ici, le support vidéo transformé en cabine d'essayage détournée de sa fonction première, par le truchement d'une performance où Mary Sue peine à essayer des chaussures dans une cabine supposée la cacher des regards indiscrets. Sans jamais "se lacer", à la vue de tous, et par le grotesque révélé dans cette scène incongrue (qui essaie des chaussures dans une cabine!), le support publicitaire est rendu au néant, annihilant la charge érotique trop souvent utilisée dans la communication marchande.

Les lois de l'attraction
Mary Sue est à la colle pour la très célèbre publicité "réalisée sans trucage" (campagne publicitaire SuperGlue3). Elle rejoue avec humour ce que la scène aurait été en situation réelle, avec une femme. Elle révèle à travers un trucage vieux comme le monde que personne n'est dupe et que la féminité apparemment oisive révélée ici n'est pas seulement due aux lois de l'attraction. Une manière de rappeler que le féminisme n'est pas seulement une guerre du corps, mais aussi la liberté pour chaque femme d'en disposer librement. 
A ne pas reproduire seul et sans de très bonnes chaussures!

Social Instinct
Un contrepied à la célèbre scène de l'interrogatoire du film Basic Instinct. L'installation réinterprète la polémique de la présence ou non d'une petite culotte portée par Sharon Stone en martelant sans cesse cette fine séparation entre Nature et Culture jusqu'à la rendre imperceptible et inoffensive. Un moyen de désamorcer ce qui fît "le buzz" en son temps, en réduisant le fantasme lubrique associé à cette polémique, à un cliché désormais éculé. 
Pour Serial Shopper uniquement!

En 2011, lors de la réalisation de ces vidéos, le Shoes Bar a donné carte blanche à l'artiste. La dénonciation du corps féminin et son érotisme inhérent utilisés à outrance étaient au cœur du propos de l'artiste.
C'est en tournant l'imagerie publicitaire en ridicule, en transformant les écrans en cabines d'essayage inutiles et grotesques, en dynamitant une scène de film ambivalente, que Mary Sue se moque des clichés de ces corps sexualisés utilisés pour faire des profits.
Aujourd'hui, alors que les images sont "lues" à toute vitesse sur les réseaux sociaux, alors qu'elles sont de plus en plus simplifiées/codifiées par ceux qui les réalisent, alors que leurs lecteurs n'ont plus le temps de percevoir le second degré salutaire qui peut parfois s'immiscer dans les images ; ces 3 œuvres font régulièrement l'objet d'une mauvaise interprétation.
Depuis peu, certains défenseurs de la cause féminine y voient une attaque contre leur camp.
Cette période folle est intéressante au regard des divisions qu'elle est capable de produire. Elle réussit même, comble de l'absurdité, à opposer les partisans d'un même combat. Mais pour défendre une cause, il n'y a pas qu'un moyen. Si l'activisme en est un, l'art peut aussi être son vecteur. C'est bien en s'incluant au coeur du système et en distillant avec ironie ce registre que Mary Sue fustige les poncifs mercantiles. 

Lorsque Le Shoes Bar décide de dédier de façon permanente ses supports publicitaires à l'artiste, l'enseigne s'engage clairement dans ce combat et celui de la liberté d'expression.